Tandis que les vignerons ont les yeux rivés sur leurs rang de vignes, les amateurs de vins ont commencé à vendanger les linéaires des Grandes Surfaces. En effet, si septembre est devenu le mois durant lequel les particuliers achètent le plus de bouteilles; cela s’explique par le phénomène des Foires aux vins. Critiqué à tort par certains, il convient de faire preuve d’objectivité en analysant le marché et en soulignant son évolution.  Quant à savoir ce que l’on trouve dans les Foires aux vins; il n’est pas inutile de revenir sur les politiques et caractéristiques des différentes enseignes.

  1. Le Marché des Foires aux vins : les chiffres sont éloquents !

Et dire que tout a commencé il y a 40 ans. Quand un breton a installé sur le parking de son Leclerc un camion avec quelques références de vins, court-circuitant ainsi les circuits de vente exclusifs. Avec l’essor des grandes surfaces, les rayons vins ont pris de l’ampleur; multipliant leurs références malgré la résistance des  grands châteaux. Ces derniers ne résistèrent guère à la force de frappe de ces enseignes; d’autant qu’au-delà même des ventes, les Foires aux Vins sont un formidable vecteur de notoriété.

Quelques ordres de grandeurs suffisent à décrire  l’engouement des français pour les Foires aux vins. Si on estime que la vente de vins en France représente un chiffre d’affaire de 3.2 Mds d’euros, il faut avoir en tête que les deux tiers sont réalisés dans les Grandes Surfaces. Or, plus de 20% du chiffre d’affaire du rayon vin de ces grandes enseignes est réalisé durant cette courte période des foires aux vins. Ainsi, si l’on agrège les ventes des 16 acteurs de la GD et des 8 principaux sites internet, les Foires aux Vins représentent un  Chiffre d’affaire supérieur à 500 me ! Autre chiffre éloquent : un français sur deux déclare acheter du vin à l’occasion de ces foires aux vins !

  1. Les Foires aux Vins : des manifestations qui ont évolué.

Le vin restant un produit complexe avec une multitude de références, la notion de conseil a toujours été essentielle. Longtemps l’apanage exclusif des cavistes, les grandes surfaces ont dû, afin d’accentuer leurs ventes, travailler sur cette notion de conseil. Or, c’est essentiellement sur les supports de communication, et non sur les hommes, que se sont concentrés leurs efforts dans le domaine. Certes, vous trouverez dans les rayons quelques sommeliers vêtus de tabliers qui vous prodigueront quelques conseils, mais la vraie évolution se situe dans tout le travail en aval de la manifestation et dans l’exploitation des médias. Quel hebdo aujourd’hui ne consacre pas un cahier spécial vins à l’occasion de ces Foires aux Vins ? Quelle enseigne ne distribue pas dans les boites aux lettres son catalogue spécial ? Et à chaque fois, bien entendu, on trouve les conseils des plus grands œnologues ou critiques. Pas facile donc de s’y retrouver avec ce trop-plein d’informations…A la question de savoir que choisir, autant aller vers des spécialistes et personnellement, je préfère m’en remettre aux analyses de la Revue des Vins de France, du Point ou du Figaro.

  1. Un large panel de Foires aux vins

Premier constat :  Bordeaux conserve une hégémonie avec plus de 46 % des volumes vendus. Ceci s’expliquant tout simplement par une offre suffisante en quantité. De même, les vins dit de négoce, voire les grandes maisons de vin comme Bernard Magrez ou Gérard Bertrand; pratiquent une réelle politique de Foire aux vins, avec une gestion spécifique de leurs marges, de leurs stocks, de leur communication…

Deuxième constat : Chaque enseigne tente de se démarquer. Ainsi, certains préfèrent multiplier les références (Carrefour, Système U). Tandis que d’autres préfèrent pratiquer une sélection drastique pour réduire l’offre (Leclerc, Intermarché). La plupart choisissent de privilégier les producteurs régionaux et proposent un tronc commun de références nationales, auquel s’ajoute les vins de la Région. Prenons l’exemple de Leclerc qui réalise près de 80 me de Chiffre d’affaires durant sa Foire : chaque magasin possède 180 références communes, ainsi que 250 autres références. Chez Carrefour, on tourne à plus de 700 références alors même que Lidl n’en propose que 150, mais à bas prix.

Troisième constat : le développement de la connectique, avec des applicatifs dédiés; notamment chez Auchan et Intermarché, de même que l’essor des ventes en lignes à l’occasion des Foires. Enfin, preuve de l’ampleur du phénomène, une enseigne comme Auchan emploie 5 acheteurs à temps plein, affectés uniquement aux Foires aux Vins; postes qui n’existaient pas il y a 10 ans.

N’en déplaisent aux puristes, qui préfèrent acheter leurs vins chez les cavistes, les Foires aux Vins sont devenues un véritable phénomène. Le marché s’adapte et avec lui la communication médiatique qui va autour. Attention néanmoins à ne pas remplacer la discussion et le conseil oral par une forme de conseil déshumanisée.

Arsène Bacchus