La place du vin dans notre société a toujours fait l’objet de controverses. 

Pour s’en convaincre, deux chiffres à eux seules suffisent:

– La consommation moyenne de vin, par an et par habitant, est passée de 80 litres en 1850, à plus de 160 litres en 1900… aujourd’hui, nous ne buvons plus « que 46 litres », soit 3 fois moins!

– Les débits de boissons, en cette fin du 19ème, ont passé la barre des 500 000, soit un pour 82 habitants… aujourd’hui, on en recense moins de 40 000 soit 12 fois moins!

En ces temps pas si reculés, il y avait un vrai distinguo entre vin et alcool, entre ivrogne sympathique et alcoolique méprisable… voire entre français et anglais.

Pour ainsi dire, les français épousent le vin, cette boisson qu’ils fréquentaient depuis des siècles, pour ne pas succomber aux méfaits de l’alcoolisme.

Le XIXème, siècle du vin: Pourquoi?

Il faut dire qu’en cette période de révolution industrielle, les conditions de vie sont difficiles et les cafés, ou autres cabarets, appelés communément mastroquets, sont des lieux de vie avec un rôle social considérable. Les vertus du vin sont donc exacerbées par le politique, qui vante sa force et la joie de vivre que procure le breuvage. Du côté des écrivains, Zola décrit le vin comme un élixir de jouvence et Baudelaire loue ses vertus créatrices.

Le législateur concrétise ce mouvement de société par plusieurs mesures:

–   En 1880, il autorise quiconque, sur simple déclaration à la mairie, à ouvrir son mastroquet pour autant qui soient servis des boissons dites salubres, comme le vin, la bière ou le cidre. Ces boissons sont même qualifiées d’hygiéniques, à la différence des autres alcools.

–   La taxe sur la consommation du vin est supprimée, de même que les octrois.

–   Enfin, dans les écoles, sont dispensés des cours sur l’antialcoolisme, lesquels mettent en exergue les bienfaits du vin.

Un siècle plus tard, force est de constater que le législateur a revu entièrement sa copie et que toutes les boissons alcoolisées sont logées à la même enseigne, ou presque.

En effet, paradoxe français oblige, on lutte contre la consommation d’alcool et dans le même temps, on souhaite développer la notoriété de nos vignobles. De même, tout est mis en œuvre pour développer l’oenotourisme à Bordeaux mais le CIVB vient de se faire condamner pour avoir vanté les vins de Bordeaux.

L’histoire du vin montre que ce breuvage a toujours eu du mal à trouver sa place dans notre société; il s’agit certes de l’apanage de tous plaisirs d’être un jour combattu, un jour encouragé, mais sur la question du vin nous sommes dans l’hypocrisie la plus totale….

Arsène Bacchus