Internet et les propriétés viticoles : le commencement d’une histoire…

Les rapports entre internet et le monde viticole sont complexes ; Le récent « rapport Raudin » sur le vignoble aquitain corrobore les précédentes études, qui constataient une frilosité du monde du vin à l’égard d’internet. Persuadés de l’intérêt de ce nouveau mode de communication, les domaines viticoles peinent en effet à maitriser toutes les arcanes de ce monde virtuel si éloigné du leur. S’il est admis que figurer sur la toile est un prérequis pour toute propriété viticole, rares sont celles qui ont su adopter une véritable stratégie internet.

1. Un site internet, le prérequis de toute propriété viticole

Nombreuses sont encore les propriétés viticoles non présentes sur la toile. En effet, seule la moitié ont un site internet et pour la plupart il ne s’agit que d’un site vitrine, avec pour seul but de présenter ses produits. Seul 15% offrent ainsi la possibilité d’acheter les produits, selon une étude de l’ADEN (Association pour le développement de l’économie numérique).

Comment interpréter ces chiffres ? Tout d’abord, il faut partir du postulat de base qu’une propriété viticole exerce avant tout une activité agricole et pour qui le monde virtuel de l’internet reste très nébuleux. Ainsi, si internet a toute sa place dans le monde du tourisme avec 93% des entreprises du secteur  présent sur la toile, le monde agricole n’est lui présent que pour 7%. Avec le développement de l’oenotourisme et des ventes à l’étranger, beaucoup sont conscients de la nécessité de s’équiper d’un site, persuadé à 70% que cela leur permettra d’accroitre leur notoriété et d’acquérir de nouveaux clients.

Reste la moitié des propriétés qui ne se sont pas encore pourvues d’un site ; la raison majeure évoquée, outre le coût devenu pourtant modique, reste une affaire de temps (70%) et de difficultés à appréhender un univers qui leur parait des plus complexes (75%). Ce constat est d’autant plus vrai que même pour les domaines viticoles pourvus d’un site, plus de 70% éprouvent des difficultés pour être visibles sur internet. Non obstant leur bonne volonté, il faut dire que beaucoup n’ont pas encore assimilé le fait qu’un site est une condition nécessaire mais pas suffisante pour mettre en œuvre une stratégie commerciale sur internet.

      2. Vers une véritable stratégie internet  pour les propriétés viticoles

Si l’on reprend le rapport RAUDIN, celui-ci indique que sur les 51% de domaines viticoles équipés d’un site, seulement 32% d’entre elles ont une page Facebook et à peine 10% un compte Twitter. Or, il est certain qu’aujourd’hui, la présence sur les réseaux sociaux est indispensable pour accroitre sa notoriété, ne serait-ce que pour être mieux référencé sur les moteurs de recherche.

Internet possède la capacité de toucher un nombre maximum de personnes, qui peuvent obtenir des informations en temps réel et où qu’ils soient dans le monde. Bien utilisé, il peut être un vecteur de communication bien plus puissant et bien moins coûteux qu’une campagne de presse. S’il est donc un axe de progrès sur lequel doivent travailler les acteurs du secteur, c’est donc bien celui de l’utilisation d’internet et des réseaux sociaux.

Dans le même ordre d’idée, on ne peut passer sous silence le trop faible référencement sur des places de marché ou tout autre site permettant de mutualiser les offres. Si  43 % des sondés admettent que ces sites peuvent permettre de faire venir des clients chez eux, seuls 8 % y sont représentés. Faisons néanmoins preuve d’optimisme puisque ce chiffre a doublé par rapport à 2012 et que les sites mutualistes ne sont pas pléthores dans le domaine viticole.

      3. Un secteur d’activité en retard ?

Pour en avoir parlé avec Estelle de Pins, dirigeante de Wine Tour Booking, trop nombreuses sont encore les réticences dans le domaine viticole, vis-à-vis d’internet et des places de marché ; elles peinent en effet à mutualiser les efforts et à externaliser certaines fonctions. Alors même que les propriétés ont toujours géré leur domaine avec une démarche produit, il faudrait maintenant qu’elles axent leurs efforts vers une vraie démarche client, tout en développant une stratégie de marque. En cela, les places de marché sont des partenaires incontournables pour qui veut se développer aujourd’hui.

Concernant le volet international, les efforts sont à souligner ; en effet, plus de 63% des sites sont traduits en anglais et 14% le sont également en chinois. Quand on sait qu’un oenotouriste sur deux est étranger, on comprend tout l’intérêt d’accentuer sa visibilité à l’international. Reste un point noir, qui réside dans le fait que seulement 56% des sites viticoles proposent des visites, alors même que la plupart sont ouvertes aux visiteurs. Cela participe du même constat évoqué ci-dessous, à savoir cette frilosité à externaliser son approche internet.

Si internet s’affirme comme un axe de développement incontournable pour les propriétés viticoles, le constat est à ce jour très mitigé. Si la nécessité de placer le web au cœur de sa stratégie s’affirme comme une évidence, rares sont les domaines à avoir adopté une véritable politique en ce sens, avec une réelle maitrise des réseaux sociaux et un recours aux places de marché.

Arsene Bacchus